L’URC Dumbea en visite à l’ASM

L’URC Dumbea en visite à l’ASM

L’URC Dumbea, club de Nouvelle-Calédonie, est partenaire de l’ASM Rugby depuis maintenant plusieurs années. Un partenariat qui s’articule autour de la formation des éducateurs du Pacifique, par des échanges constants entre les deux entités, et par l’accueil potentiel de joueurs et joueuses Néo-Calédoniens sur nos terres auvergnates. Henzo Kiteau, pilier droit international U20, fait aujourd’hui parti de l’effectif Espoirs montferrandais.

Dans le cadre de ce partenariat, Patrick Larget, vice-président du club et de passage en Métropole en ce début d’année 2022, nous a rendu visite à Clermont-Ferrand. Une visite qui a vu Patrick suivre un entrainement et la préparation d’un match Espoirs, ainsi qu’une journée avec l’équipe Elite de l’ASM Romagnat, puis la rencontre de Coupe d’Europe entre nos jaune et bleu et l’équipe anglaise de Sale Sharks.

 

Bonjour Patrick, peux-tu te présenter ?

J’ai commencé le rugby en scolaire en UNSS. Puis j’ai dû arrêter à la croissance pour des soucis de dos. J’ai repris au Lycée puis en Universitaire sur Paris. Ensuite j’ai joué au SCO Rugby Angers, au RC Orléans, et à Orléans la Source, à tous les postes de la première ligne mais principalement au talonnage.

J’ai dû arrêter à 30 ans en 2003 en raison d’une blessure (hernies discales aux cervicales). Cela a été une page très difficile à tourner, d’autant que le reste du corps allait bien….

Je suis devenu éducateur ensuite, en Nlle Calédonie principalement, où nous sommes arrivés en 2004 avec ma famille. 4 de mes 5 enfants ont joué à Dumbéa, mon club ici, y compris ma fille ainée, au talonnage également…. Nous sommes une famille de Rugby puisque mon épouse a joué aussi au SCO Rugby Angers, toujours au talonnage…

J’ai d’abord eu les U6 comme éducateur. Puis les U8. Avec un BF Initiation découverte. On m’a ensuite demandé de coordonner les éducs du club ce qui a été mon rôle pendant 1 an et enfin de prendre la responsabilité de l’Ecole de Rugby et des jeunes ce que j’ai fait pendant 5 ans.

J’ai donc passé mon CF de Coordo EDR (je suis le seul à l’avoir en NC) puis un BF Perfectionnement.

 

Quel est ton rôle au sein de l’URC Dumbea ?

J’ai donc été responsable de l’EDR pendant 5 ans de 2017 à 2021.

J’ai créé en parallèle en 2018 une section de Rugby à 5 à toucher. Au début pour se regrouper le soir avec les éducs de l’Ecole De Rugby en dehors de l’encadrement de nos jeunes et prendre du plaisir entre « anciens ».

On s’est pris au jeu rapidement à l’entrainement puis aussi en compétition « loisirs » puisque l’on a gagné le premier tournoi auquel nous avons participé, et plein d’autres depuis…

Cette section « pour rigoler » au départ a pris son envol propre et vole maintenant de ses propres ailes avec parfois 30 joueurs à l’entrainement…et un responsable ad hoc qui me relaie depuis 2 saisons. Les jeunes du club ont vu qu’on s’amusait bien et sont donc venus nous rejoindre, mais aussi des gens complètement « hors rugby » qui viennent prendre du plaisir avec un ballon de rugby.

Nous avons également bcp de féminines qui viennent s’entrainer avec nous, ce que permet ce super sport sans contact, mélanger les âges, les sexes, les niveaux pour que tout le monde s’éclate.

Je suis Vice-Président du club depuis la dernière AG du club en mars 2021 et je suis en charge du développement du club et des partenariats, rôle que j’assumais déjà, en plus de l’Ecole De Rugby.

 

L’URCD est un club bien structuré en Nouvelle-Calédonie, a-t-il un rôle sur l’ile au-delà du rugby ?

Oui nous essayons d’avoir un rôle social en plus du sportif. Notre devise est « 3 couleurs, 1 seul club » et nous l’assumons tous les jours. Notre logo qui illustre cette devise montre 3 visages de couleurs différentes représentant les différentes communautés présentes en NC (kanaks, polynésiens, européens, etc.). Cette dimension citoyenne est très importante pour nous.

Dans un pays parfois cloisonné, nous sommes l’exemple même de ce que l’on appelle ici le « destin commun » et que le sport est un vecteur de cohésion sociale, de partage, de mélange et de solidarité.

Nous avons aussi une action auprès du public handicapé avec un projet de Handy Rugby avec des actions ponctuelles depuis 2 ans dans un collège de la commune dans une classe d’Ulis de jeunes en fauteuil. Ce projet devrait se transformer en section pérenne Handisport en 2022, ce qui serait la seule offre de sport adapté sur notre commune.

Enfin, nous intervenons aussi dans les quartiers et dans un collège difficile en périscolaire le midi dans un quartier excentré au Nord de la commune. Le CPE du collège nous renouvelle ce projet depuis 2 ans car la tension/violence au sein de l’établissement a nettement réduit depuis sa mise en place.

 

Aujourd’hui l’URCD et l’ASM sont partenaires, peux-tu nous expliquer en quoi consiste ce partenariat ?

Ce partenariat porte principalement sur la formation de nos éducateurs. En effet le but est de les faire monter en compétences pour que nos jeunes soient encore mieux formés. Notre club est un club formateur, c’est notre ADN depuis notre création en 2009.

Nous avons ainsi été le premier club de tout le Pacifique à avoir notre Ecole De Rugby Labellisée par la FFR en juin 2018 (nous sommes restés les seuls en NC jusqu’en 2021).

Soulever le bouclier de Champion de Calédonie (ce que nous avons fait déjà plusieurs fois à 7 et à XV) est toujours un plaisir bien sûr, mais ce n’est pas notre priorité. Ce que nous souhaitons c’est former au mieux nos jeunes à être de bons joueurs mais aussi à être de bonnes personnes, de bons citoyens. Le respect, les valeurs, et le langage sont très importants pour nous par exemple. Et les meilleurs partiront ensuite vers le haut niveau s’ils le peuvent et le souhaitent.

Mais notre rôle social pour tous nos gamins aura été atteint ici.

 

Qu’est-ce que l’ASM apporte à l’URCD à travers ce partenariat ?

Du coup nous avons mis en place une convention de partenariat signée en mars 2019 et l’ASM s’engage à venir former nos éducateurs au moins 1 à 2 fois par an en Nouvelle Calédonie. Et nous pouvons aussi venir nous former à l’ASM, ce que j’ai fait récemment en janvier 2022 en participant à des prépas de matchs avec l’équipe Espoirs de l’ASM et l’ASM Romagnat.

Bien sûr le Covid est hélas passé par là… Et nous n’avons pu faire que 2 déplacements pour le moment en 2019. Mais nous avons su nous adapter et nous avons faits des formations en visio régulièrement avec nos éducs et le staff ASM, dont 7 séances par exemple cette année en 2021.

 

Quels sont les enjeux futurs de ce partenariat selon toi ?

On sait que l’ASM est en transformation en ce moment avec des mouvements à sa tête. Nous sommes pour notre part ravis de ce partenariat et souhaitons non seulement le faire perdurer mais aussi le renforcer. Nous avons par exemple rajouté les féminines et maintenant le Handy Rugby dans la convention. Et enfin nous avons accueillis en son sein nos cousins de Wallis et Futuna avec qui nous avons aussi signé des partenariats pour les aider à se développer.

En gros l’ASM est notre grand frère en métropole.

Et nous sommes le grand frère de ces clubs dans le Pacifique via cette convention mais aussi en accueillant par exemple leurs meilleurs éléments quand ils viennent à l’Académie Pôle Espoirs en NC.

Je sais que l’ASM avec Bertrand RIOUX son directeur du centre de formation en tête sont aussi ravis de ce partenariat. Pour moi la prochaine étape est aussi de créer le lien avec Fidji et le partenariat historique que l’ASM a là-bas. Fidji est notre voisin et nous y travaillons déjà avec Franck Boivert qui est sur place. J’y suis allé le rencontrer fin 2019 pour en parler.

Hélas le Covid a perturbé nos plans, mais nous sommes en contacts réguliers.

Et si nous pouvons sortir des jeunes de haut niveau, comme Henzo KITEAU qui est issu de notre club et qui est actuellement Espoirs au centre de formation ASM en passe de signer un contrat pro, la boucle sera bouclée pour notre plus grande joie et fierté.

 

Que retiens-tu de ton passage à Clermont-Ferrand au mois de Janvier ?

Un accueil formidable, amical, comme toujours, plein de sens et des valeurs humaines que nous partageons. Nous n’avons pas le sentiment d’être le petit club reçu par le grand club mais celui d’être un vrai partenaire, ce qui est le cas. J’ai eu la chance de participer à des prépas de matchs avec ASM Espoirs et ASM Romagnat et de partager ces moments de travail avec les 2 staffs que je remercie de nouveau au passage. Et de vivre un match féminin Elite et masculin avec l’ASM en coupe d’Europe.

Cela a été très formateur pour moi de voir un club pro à l’ouvrage et de voir le niveau d’exigence et de rigueur que cela impose. C’est ce que nous expliquons à nos jeunes qui veulent y tendre. Cela me donnera encore plus d’exemples concrets pour leur expliquer ce que cela représente.

J’ai aussi pu discuter avec Henzo et Valentin qui sont 2 jeunes du Pacifique sur leur ressenti de leurs expériences.

 

Tu as profité de ton séjour en Metropole pour faire un petit Tour de France, quel en était l’objectif ?

Le but était justement (en plus de vacances en famille, sans retour en France depuis 5 ans) de faire le tour de nos jeunes en métropole. Nous avons la chance, comme je le disais d’être un club formateur et d’avoir donc une quinzaine de nos jeunes qui évoluent à différents niveaux en métropole (du Top 14/Pro D2 à la Fédérale 3).

Cela permet de vérifier que tout se passe bien pour eux, d’avoir aussi le retour de leurs clubs. Nous n’avons eu que des retours positifs sur nos jeunes, que ce soit sur leur comportement sur et en dehors du terrain.

C’est donc une fierté pour nous… Notre objectif d’en faire des joueurs et des citoyens de qualité semble donc atteint…

 

A travers tes missions tu as vu plusieurs joueurs ou joueuses partir en Métropole, quels sont les difficultés que peuvent éprouver les joueurs à leur arrivée ?

La principale difficulté est bien sur l’éloignement et le manque de la famille, qui est une notion hyper importante dans notre culture Pacifique. Mais passées les premières semaines ils semblent bien s’y adapter. Les moyens modernes de communication permettent aussi maintenant de rester en contact. Nous n’avons donc pas pour le moment de manque qui nécessiterait un retour.

La vie est aussi très différente en métropole. Nous essayons maintenant de les y préparer au mieux et nous avons des entretiens avec les jeunes et leurs familles en amont de leurs projets de départ. Pour bien faire comprendre à tous l’enjeu d’un tel choix et les conséquences.